Le mot d’ordre actuel pour les collectivités est le suivant : rationaliser leurs interactions et garantir une qualité de service homogène à l’ensemble de leurs publics. Mais comment passer de l’intention à l’action ? La réussite de ce projet structurant repose sur une méthodologie en trois temps : construire une offre cohérente en rationalisant l’existant, orchestrer les flux de données pour briser les silos, et diffuser un catalogue de services via des canaux adaptés aux nouveaux usages.
Pierre Boizard, Directeur commercial chez Blueway, et Gauthier Coponat, Product Owner Forum RH chez Blueway, nous dévoilent leur feuille de route pour déployer un catalogue de services qui garantit équité, transversalité et efficacité opérationnelle.
De la vision politique à la réalité opérationnelle : comment traduire les priorités en catalogue de services ?
La mise en place d’un catalogue de services dépasse largement le simple cadre d’un projet technique ou informatique. Elle constitue la traduction concrète et opérationnelle des grandes orientations politiques de la collectivité. Qu’il s’agisse de garantir l’équité territoriale, de favoriser l’inclusion numérique ou de soutenir spécifiquement les publics prioritaires, le catalogue doit être le miroir des valeurs portées par le mandat. L’ambition est claire : il s’agit d’aligner la qualité de la Gestion de la Relation Agent (GRA) sur les standards déjà déployés pour les citoyens (GRC). Cette symétrie des attentions implique une approche inclusive et proactive.
Concrètement, l’inclusion numérique ne doit pas se limiter au respect des normes d’accessibilité RGAA pour les interfaces web. Elle exige de penser des parcours adaptés pour les agents « déconnectés » — tels que les agents de collecte ou ceux des espaces verts — qui ne disposent pas d’un poste informatique au quotidien. Le catalogue doit être accessible à tous, partout.
“La collectivité doit passer d’une logique de guichet à une logique d’aller-vers”.
En exploitant intelligemment la donnée, comme le quotient familial par exemple, il devient possible de proposer proactivement les droits et services aux agents éligibles. Plutôt que d’attendre qu’ils en fassent la demande, le catalogue de services devient un outil de lutte contre le non-recours aux droits, ciblant efficacement les publics prioritaires.
Concevoir son catalogue de services : recenser, structurer et formaliser
L’étape de construction est souvent la plus intimidante : face à la montagne de procédures existantes (demandes de travaux, réservations de salles, signalements, formulaires RH…), le risque est grand de vouloir tout digitaliser de front. Cette approche « Big Bang » est pourtant la voie royale vers l’épuisement des équipes et l’effet tunnel. Pour réussir, la méthode doit être rigoureuse : il s’agit de recenser, mais surtout de qualifier. Mais comment standardiser sans multiplier les « cas particuliers » ?
“La philosophie à adopter tient en une maxime : penser grand, agir petit”.
Si la vision cible doit être ambitieuse et couvrir l’ensemble du périmètre à terme, l’exécution, elle, doit être progressive et itérative. Afin de distinguer l’essentiel du superflu et d’éviter une complexité excessive, chaque service doit être soumis à une matrice de priorisation. Cette approche se base sur deux axes décisionnels majeurs :
- L’axe de la valeur : Quel est le gain pour l’usager ? Ce service répond-il à une priorité politique forte ? Permet-il de fluidifier un point de douleur critique ?
- L’axe de l’effort : Quelle est la complexité technique de mise en œuvre ? Les données sont-elles propres et disponibles ? L’organisation est-elle prête à changer ses habitudes ?
Ce filtrage permet de classer objectivement vos chantiers en trois familles :
- Les « Quick Wins » : Ce sont les projets à faible effort technique mais à impact visible immédiat. Ils sont indispensables au démarrage pour prouver la valeur de la démarche et emporter l’adhésion des équipes.
- Les projets structurants : Ils demandent un effort soutenu mais délivrent une valeur stratégique majeure. Ils constituent la colonne vertébrale de votre transformation et se planifient sur le moyen terme.
- Les « puits sans fond » (À éviter) : Ce sont ces processus complexes, consommateurs en temps et en budget, pour une valeur ajoutée marginale. Savoir les identifier pour les déprioriser (ou les abandonner) est un acte de gestion sain.

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Gouverner, outiller et maintenir son catalogue de services
Une fois le catalogue défini, le véritable défi opérationnel commence : comment le faire exister au sein d’un Système d’Information (SI) souvent hétérogène, hérité de décennies d’histoire administrative ? La réalité de la plupart des collectivités est celle d’un paysage applicatif fragmenté, où cohabitent des logiciels « métiers » très performants mais isolés (RH, finances, services techniques, État Civil), créant inévitablement des ruptures de charge et des ressaisies incessantes.
C’est ici qu’intervient la notion fondamentale de transversalité. L’erreur serait de vouloir « casser les silos » en remplaçant les solutions transactionnelles — qui restent les véritables cœurs de métier indispensables à l’expertise de chaque direction. Au contraire, l’approche pragmatique consiste à les conserver tout en les décloisonnant.
”L’orchestration, via une solution d’échange de données comme Phoenix, permet de déployer une couche horizontale agile au-dessus de ces strates verticales”.
La plateforme idéale agit comme un connecteur universel, ou un « chef d’orchestre » numérique, entre les silos existants. Elle permet à la donnée de circuler librement pour fluidifier les processus de bout en bout, transformant des procédures administratives complexes et multi-acteurs en parcours utilisateurs simples et automatisés. Concrètement, une demande unique de l’agent peut déclencher une cascade d’actions synchronisées dans le SIRH, l’outil de gestion de parc et le logiciel financier, garantissant ainsi une exécution rapide et sans erreur.
Rendre le catalogue utile, visible et vivant
Un catalogue de services, aussi complet soit-il, n’a aucune valeur s’il reste une ressource statique et peu consultée. La réussite du projet ne se mesure donc pas au nombre de services disponibles, mais à leur taux d’adoption réel par les agents. Pour cela, la stratégie de diffusion doit impérativement s’adapter aux nouveaux modes de consommation de l’information, marqués par la mobilité.
“Le défi est de garantir une expérience sans couture et une parfaite cohérence de l’information, quel que soit le canal d’accès choisi par l’usager (guichet d’accueil physique, centre d’appels, application mobile ou intranet)”.
C’est le principe de l’omnicanalité : qu’un agent consulte ses droits sur son smartphone ou qu’il appelle un gestionnaire pour une confirmation, la réponse doit provenir d’une source unique et partagée. Cette unicité est le socle de la confiance : rien n’est plus destructeur pour l’adhésion au service que des informations contradictoires entre le web et le téléphone.
Car pour une grande partie des effectifs — agents de la voirie, personnels des crèches, équipes techniques — le “bureau” n’existe pas. Pour les agents de terrain, le smartphone personnel ou professionnel est souvent le seul point d’entrée vers l’administration. Le catalogue ne doit pas simplement être « compatible mobile », il doit être pensé « Mobile First ». L’ergonomie doit être simplifiée à l’extrême pour permettre une utilisation rapide, tactile et efficace, directement sur le lieu de travail.
L’apport de l’IA représente un autre point intéressant. Face à la densité et parfois la complexité administrative de l’offre RH (par exemple), la recherche par mots-clés montre vite ses limites. Un assistant virtuel (Chatbot) dopé à l’IA devient alors un allié précieux. Disponible 24h/24 et 7j/7, il permet de guider l’agent en langage naturel (« Combien de jours de congés me reste-t-il ? », « Comment déclarer un accident ? ») vers le bon service. Au-delà du confort pour l’utilisateur, c’est un levier de performance pour les services RH, qui se voient déchargés des questions récurrentes à faible valeur ajoutée pour se concentrer sur l’accompagnement humain des situations complexes.

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La gouvernance au-delà du Go Live
Le lancement du catalogue (Go Live) est souvent perçu comme l’aboutissement du projet, alors qu’il n’en est que le point de départ. Un catalogue de services est vivant : s’il n’est pas régulièrement enrichi et mis à jour, il se vide de sa substance et devient rapidement une coquille vide que les agents cesseront d’utiliser. Pour garantir sa pérennité, il est nécessaire d’instaurer une gouvernance structurée autour de rituels précis. Il est donc important d’identifier et de nommer un responsable unique pour chaque famille de services (RH, Logistique, IT). Ces « propriétaires » ne sont pas nécessairement des techniciens, mais des experts métier. Ils deviennent garants de la fraîcheur de l’information, de la pertinence des formulaires et de la satisfaction des utilisateurs finaux sur leur périmètre.
Des revues trimestrielles doivent également être organisées pour auditer la performance du catalogue. Sur la base de KPIs (taux d’usage, délais moyens de résolution, notation des utilisateurs), ce comité décide de l’évolution de l’offre. Il doit pouvoir trancher : faut-il optimiser ce parcours ? Faut-il dépublier ce service obsolète ? Enfin, l’accompagnement ne doit pas s’arrêter à la formation à l’outil lors du lancement. Il s’agit d’ancrer une nouvelle culture de service, en rassurant les gestionnaires sur l’automatisation (qui ne les remplace pas mais les augmente) et en valorisant les nouveaux usages.
“Construire, orchestrer et diffuser un catalogue de services est bien plus qu’une mise à niveau technique : c’est un levier puissant de modernisation des collectivités”.
En alliant une méthodologie rigoureuse de priorisation, une orchestration technologique transversale capable de briser les silos, et une diffusion « Mobile First » adaptée aux réalités du terrain, vous transformez en profondeur la relation agent. Le résultat ? Une administration plus agile, plus efficiente, et une marque employeur considérablement renforcée, atout indispensable pour attirer et fidéliser les talents de demain.

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